Le cercle de lecture du mois de mai vous fait découvrir « Alabama 1963 »
Le Cercle de Lecture de la MJC se réunit chaque dernier samedi du mois, de septembre à juin, autour d’un roman. Le 31 mai dernier, Isabelle proposait aux membres du cercle de découvrir « Alabama 1963 ».
« J’ai beaucoup aimé ce livre que l’on classera comme bon nous semble dans la catégorie polar, roman noir, thriller ou encore roman policier. J’ai apprécié en particulier la fluidité de l’écriture, le style des auteurs, les personnages sympathiques, cohérents et crédibles d’Adela et Bud ainsi que l’intrigue bien ficelée qui nous tient en haleine jusqu’à la fin.
J’ai noté que ce livre s’adresse à un large public car d’une part, il est très instructif concernant l’époque de la ségrégation en Amérique et d’autre part, bien qu’il s’agisse d’une enquête sur un sérial killer, les auteurs ne se sont que peu attardé sur les détails macabres ou morbides lors de la découverte des corps. Seule la première scène du livre (qui est aussi la première page) nous annonce sans ambages la couleur avec la découverte du corps d’une jeune fille noire. En même temps qu’elle meilleure entrée en matière pour un thriller ?
Le récit se concentre davantage sur la personnalité des divers protagonistes et sur l’enquête, à savoir la recherche de la vérité, que sur les disparations inquiétantes et les meurtres avérés. Si ces derniers sont toutefois mentionnés, ils le sont de façon succincte et rapide.
Les personnages principaux sont Adela et Bud. Adela Cobb a eu 4 enfants dont un est décédé, elle a à peine 34 ans et déjà elle est veuve de Moris. Elle vit avec ses trois enfants et elle héberge, plus par pitié que par affection, son beau-frère Lazarus.
Bud Larkin, la 40taine passée, est un ancien policier reconverti en détective privé. Il a perdu son poste dans la police après avoir accidentellement tué un collègue. Ce soir là, il avait bu un peu trop… mauvaise habitude prise après le décès de sa fille.
Bud accepte sans grande motivation d’enquêter sur la disparition d’une petite fille noire. En réalité et pour l’heure, il a plus envie de se laisser aller à entretenir son alcoolisme que de mener une enquête criminelle, mais cela peut lui rapporter un petit billet et comme justement il est à sec, ca tombe bien.
Adela qui n’a pas la langue dans sa poche et qui se trouve être sa toute nouvelle femme de ménage lui propose de l’accompagner pour ce qui est d’interroger les voisins de la disparue. En effet, la plupart des voisins de la fillette sont noirs et tous fréquentent la même église. Le problème est que Bud est blanc et que les noirs n’ont pas plus confiance dans les blancs que les blancs n’ont confiance dans les noirs. C’est entre autre parce que les fillettes disparues sont noires que la police n’en fait pas une priorité. Et c’est aussi pour cela que les familles se rabattent sur Bud, presque en désespoir de cause. Le récit nous plonge dans l’ambiance ségrégationniste de 1963 précisément… ce qui ne manque pas de nous rappeler l’atmosphère hautement dérangeante des célèbres romans « La couleur pourpre » et « La couleur des sentiments ».
Et puis bien sûr, les auteurs mentionnent des faits historiques qui ont marqué l’année 1963 : l’assassinat du Président Kennedy ; le mémorable discours du pasteur Martin Luther King « I have a dream » ; les émeutes de Birmingham suite à l attentat terroriste perpétré contre l’église Baptiste et dont les responsables se trouvaient être des membres du KKK. Ils évoquent Rosa Park qui, quelques années plus tôt (1955) a refusé de laisser sa place à un passager blanc dans un autobus de Montgomery (Alabama). Et bien évidemment, nos auteurs ne font pas l’impasse sur la partie notoire de l’époque où les noirs étaient considérés comme des pestiférés. D’où la nécessité absolue de leur rappeler au cas où ils feraient l’erreur inexcusable de l’oublier, quelle était leur juste place dans la société. Cela se concrétisait par des panneaux et affiches « Only white » dans les bus, les commerces, les restaurants, les bars, les lavoirs, les parcs, … ce qui donne lieu à quelques anecdotes souriantes.
Dans ce climat très raciste, les auteurs mettent en avant les relations humaines et notamment l’intelligence et la grande ouverture d’esprit d’Adela et Bud. Bud voit en Adela un instrument très utile pour l’aider à mener son enquête… ce faisant, il s’offre une opportunité incomparable de l’approcher sans préjugés. Plus il connait Adela, plus il lui fait confiance et plus ses préjugés reculent. Il accepte même de fêter Thanksgiving chez elle avec sa famille… A la surprise de tout le quartier et même au risque de subir les représailles du KKK.
En matière d’ouverture d’esprit, on peut citer Gloria, une patronne blanche d’Adela qui la considère ni plus ni moins que comme une amie, sans se poser d’autres questions ne si laisser influencer par le racisme ambiant. Il y a également Shirley Akerman, sa patronne homosexuelle qui n’est pas plus raciste qu’Adela n’est homophobe.
Le roman touche aussi du doigt l’espoir qui commence à poindre pour la population noire, en effet, Adela commence gentiment à s’émanciper, elle apprend à lire et même à conduire. C’est aussi elle qui a proposé à Bud de l’aider pour son enquête. Cerise sur le gâteau, elle fait preuve d’un courage impressionnant quand elle délivre la dernière victime retenue prisonnière dans une cabane isolée.
J’ai trouvé génial le Twist final… on nous présente contre toute attente un psychopathe, hors de tout soupçon. On l’a côtoyé tout au long de l’histoire sans même jamais douter de lui un seul instant. Quel coup de maître !!! . »
Isabelle P., membre du Cercle de lecture